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Depuis plusieurs jours, Milly était en effervescence, à l’entrée des routes principales des portiques se montraient, dans la grande rue des guirlandes flottaient et sur la place du Marché des mâts se montaient, ornés de drapeaux ; aussi samedi soir, la fête commença par le rassemblement place de la Mairie, qui elle aussi était décorée, de la musique, des pompiers, de la population pour la traditionnelle retraite aux flambeaux qui parcourut les rues de la ville au son des marches entraînantes à la lueur des torches et lampions, des feux de Bengale de toutes couleurs.
Sur le boulevard du Nord, lieu de la fête foraine, où se pressaient, pour la joie et le plaisir de tous, de nombreux manèges, boutiques ; l’illumination était complète dans son cadre de verdure. Saint-Pierre sur son piédestal regardait d’un œil amusé cette fête qui lui rappelait les fêtes d’avant-guerre, car il y avait bien longtemps que la Saint-Pierre n’avait connu une telle animation ; les boutiques, les tirs, loterie, grande roue, les baraques de phénomènes, le mur de la mort, les manèges de chevaux de bois, de bateaux, les chenilles, les autos, les balançoires, etc., il y en avait vraiment pour tous les goûts et tous les âges, et la jeunesse.
Le dimanche matin, à 7 heures, sonnerie de cloches ; ce fut ensuite l’arrivée des corps de sapeurs-pompiers qui se manifestèrent par quelques coups de clairons de-ci de-là. Le rassemblement avait lieu place Grammont.
A 9 heures, à l’école des garçons : théorie.
A 10 heures, place Grammont : inspection des corps.
A 10 h 15, revue par les membres du jury
A 11 heures, place de l’Hôtel de Ville, rassemblement des corps.
Le cortège se forma, musique en tête, pour se rendre au monument aux morts par la grande rue ; place du Marché et rue Mortera ; en passant devant la maison Duché, le cortège fit une halte, dans un geste touchant, les forains déposèrent une gerbe au pied de la plaque de la maison et la musique joua la Marseillaise ; chacun eut une pensée pour Fernand Duché, si brave, si bon camarade pour tous, dont les forains comme tous ceux qui l’approchaient pouvaient reconnaître la bonhomie et qui est resté au nombre des braves dans les camps nazis ; le cortège, continuant son chemin, arriva au monument aux morts des deux guerres ; après le dépôt des gerbes, M. Poiget, maire de Milly, conseiller général, demande une minute de silence et la musique joua la Marseillaise, sous le commandement du Capitaine Château ; le cortège reprit le départ par le Boulevard de l’Est et la rue Langlois, pour se rendre à l’Hôtel de Ville, où, après un morceau de musique, M. Poiget salua l’arrivée de M. Perreau-Pradier, sous-préfet de Corbeil, qui décerna quelques médailles, entre autres à Mme Moreau, femme de service à l’école maternelle pour ses services rendus aux enfants. Un vin d’honneur dans les salons de l’Hôtel de Ville termina cette petite réception.
L’heure du déjeuner arriva, les officiers se rendirent à l’Hôtel du Lion d’Or, où un repas très bien préparé leur fut servi et à l’heure du café l’heure des discours sonna. M. Poiget donna la parole à M. Robert Limery, lieutenant des sapeurs-pompiers de Milly, le Commandant Quinette, M. le Capitaine Château, M. Bernos, des affaires économiques à la Préfecture, puis M. Poiget prit lui-même la parole en ces termes :
Maire de Milly, Conseiller Général
Nous regrettons tous que M. Le Préfet de Seine-et-Oise n’ait pu, aujourd’hui, rehausser de sa présence l’éclat de notre fête, mais nous comprenons qu’il ne lui soit pas possible de s’évader de Villacoublay où se déroule aujourd’hui même une brillante manifestation aéronautique.
Nos regrets sont toutefois bien atténués, puisqu’il a délégué pour le remplacer notre sympathique sous-préfet de Corbeil, M. Perreau-Pradier.
Nous savons, Monsieur le Sous-Préfet, tout l’intérêt que vous portez aux communes de notre arrondissement et à notre cité, en particulier. Il semble que vous ayez le don d’ubiquité, puisque vous savez être partout où l’on vous réclame et combien sont nombreuses les sollicitations dont vous êtes l’objet. Nous vous sommes profondément reconnaissants de votre bienveillante attention et tant en mon nom personnel qu’au nom de la population tout entière, je vous prie de bien vouloir accepter mes remerciements les plus sincères.
En organisant aujourd’hui ce concours de pompes régional, la population de Milly a eu le désir de répondre à la fois au vœu d’une grande partie de nos concitoyens, ainsi qu’à celui des sapeurs-pompiers de la ville et des communes du canton et même des départements limitrophes.
Si nos efforts ont été couronnés de succès, nous le devons, pour une grande part, aux concours précieux qui nous ont été spontanément offerts, ceux de M. le Commandant Quinette, inspecteur départemental des services d’incendie, dont nous regrettons l’absence à ces agapes amicales, mais qui, cet après-midi, sera des nôtres après avoir assisté à Maisons-Laffitte à un concours de pompes ; de M. le Capitaine Gruber et de M. le Capitaine Château, qui n’ont pas ménagé leurs déplacements à Milly pour étudier dans les moindres détails l’organisation technique de cette manifestation afin d’en assurer le succès.
S’il est vrai que la plupart des actions humaines ont, hélas, pour mobile exclusif, l’intérêt personnel, il est juste de noter qu’il est d’heureuses exceptions. Les sapeurs-pompiers en sacrifiant leur temps, en accourant au secours de leurs concitoyens en proie au sinistre, en affrontant courageusement le danger et en faisant au besoin le don de leurs personnes, nous montrent que les plus pures vertus altruistes ne sont pas disparues de notre pauvre humanité et ils constituent pour les jeunes une indispensable solidarité. Peut-être, d’ailleurs, ne savons-nous pas reconnaître comme il conviendrait les mérites de cette phalange de braves gens. Il nous faut en effet regretter l’indifférence, pour ne pas dire la carence des pouvoirs publics qui refusent encore aux communes la priorité des fournitures de matériel d’incendie. Tout retard apporté à la satisfaction des demandes des communes dans ce domaine se traduit peut être pour nos braves sapeurs-pompiers par l’impossibilité de soustraire aux flammes une ou plusieurs vies humaines.
M. le Sous-Préfet, j’en suis persuadé, sera notre interprète auprès de l’Administration pour que nos revendications soient prises en considération.
Notre sympathique lieutenant, Robert Limery, en associant la compétence au dévouement, a su donner une âme au corps qu’il dirige. La population lui en sait gré et je suis heureux de lui dire combien nous apprécions son autorité et ses initiatives.
Il m’est agréable de pouvoir adresser mes biens vives félicitations aux personnes qui, ce matin, ont été l’objet de décorations méritées. Certains considèrent avec mépris ce qu’ils nomment des hochets, mais toute récompense due au mérite et non à l’influence impose le respect.
Je tiens à remercier avec M. le Sous-Préfet, M. de Ganay, ancien conseiller général qui, bien que relevant d’une grave maladie, a tenu à être près de nous aujourd’hui ; MM. Les Maires et Conseillers Municipaux du canton ; M. le Capitaine Gruber, M. le Capitaine Château, que la population connaît bien. M. le Commandant Mercier, M. le Capitaine Chasseignaux, M. le lieutenant Bellavoine, M. le lieutenant Papelard, membres du Jury. MM. Les officiers commandant les corps de sapeurs-pompiers, M. le Commandant Girard d’Etampes, M. le capitaine Haldebique, M. le lieutenant honoraire Adolphe Limery, M. le Commissaire spécial de Juvisy, M. l’adjudant-chef commandant de la section de gendarmerie d’Etampes, M. le chef de la brigade de gendarmerie de Milly, M. Barker, représentant de la presse et enfin tous nos concitoyens qui ont bien voulu participer à ce déjeuner fraternel.
Je remercie également les membres de la commission des fêtes et les commerçants de l’aide qu’ils nous ont apportée et M. Boissière, secrétaire général de la mairie, qui ne nous a pas ménagé son temps et dont les efforts sont pour une large part à l’origine de la réussite de ce concours.
Je forme le vœu que tous conservent de cette journée un excellent souvenir. Ce serait pour notre petite ville, qui a tout mis en œuvre pour recevoir dignement ses invités, la meilleure des récompenses.
Je dis encore une fois merci à tous et honneur à nos sapeurs-pompiers.
Pour terminer les discours, M. Perreau-Pradier, avec son aisance habituelle, répondit à tous les discours et fit battre par tous les assistants un triple ban pour le Président de la République.
Chaque corps des sapeurs-pompiers était accompagné d’un pompier de Milly qui les pilotait et les conduisit également, pour déjeuner, dans leur restaurant respectif.
Tous les pompiers furent unanimes pour reconnaître qu’ils avaient été très bien servis dans les restaurants et très bien reçus partout.
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Sapeurs pompiers devant l'école des filles en 1949.
Et chaque corps de pompiers fit les exercices sur un bâtiment de la place du Marché. Le public put se rendre compte de la dextérité, de la souplesse qu’il faut à nos braves pompiers pour assurer notre tranquillité.
A la suite de ces exercices, la compagnie d’Etampes fit une démonstration sur la place de l’Eglise avec son matériel de pompe, chacun put voir la force de jet des huit lances marchant à la fois, ainsi que la grosse lance soutenue par trois hommes ; en un rien de temps le sol fut rafraîchi.
Vers 19 heures, du haut des marches de l’Hôtel de Ville, M. le Commandant Quinette proclama les résultats et distribua les prix et récompenses dont nous donnerons le détail la semaine prochaine. Cette lecture fut faite au milieu des acclamations de tous les sapeurs-pompiers.
Pendant ces exercices, à 17 heures 30, la fanfare municipale donnait un concert très réussi et très goûté du public venu nombreux pour applaudir nos musiciens, sur le boulevard de la fête, ombragé à souhait.
Le concours des sapeurs-pompiers avait amené beaucoup de monde à Milly, le temps fut de la partie et chacun ayant fait de son mieux, tout marcha très bien, les rues bien décorées ; les commerçants avaient, eux aussi, décorés leurs devantures ou fait de beaux étalages agréables à voir, tout contribua vraiment à ce que la Saint-Pierre se passe très bien ; l’organisation était bien faite et chacun gardera un bon souvenir de cette Saint-Pierre 1947.
Le soir vit encore la grande affluence ; le bal Duché fit danser jusqu’au matin vers 5 heures toute une jeunesse avide de plaisirs. Le lundi matin, ce fut le repos, mais l’après-midi, les jeux pour les enfants obtenaient un succès fou, ainsi que les mâts de Cocagne et les courses ; même les vétérans s’en mêlèrent ; aussi, le lundi soir, ce fut très calme, mais enfin de nombreux flâneurs vinrent tout de même dire le traditionnel bonsoir à Saint-Pierre.
Dimanche 13 Juillet, le bal continua sur son emplacement de la Saint-Pierre en matinée et en soirée.
L'Abeille d'Epampes du 19 juillet 1947.
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