Claude Duneton, né en 1935 à Lagleygeolle en Corrèze
et mort à Lille le 21 mars 2012, était un écrivain, romancier et traducteur,
historien du langage, chroniqueur au Figaro Littéraire, comédien et bien
d'autres choses encore.
Il fut
professeur de Français et d'Anglais dans les années 60 au collège de Milly qui
était alors, avec le même nom, dans les murs de l'actuelle école Jean-Cocteau.
Il s'en
souvint quant il écrivit « La puce à l'Oreille » qui le fit
connaître comme un dénicheur d'expressions dont il cherchait, autant que faire
se peut, à retrouver des origines attestées.
A propos de la connivence de langage nécessaire entre les gens, il écrivit ceci dans ce livre :
« Il y a trois ans, j'ai eu
l'occasion de comparer d'une façon précise l'ambiance des cafés de la région
parisienne et celle qui règne dans les cafés de chez nous. Par hasard, j'ai
passé de longues heures, pendant plusieurs mois, dans un débit de boissons de
Milly-la-Forêt, au sud de Paris. Je venais de résider en Corrèze, et une chose
m'a frappé : les cafés de Milly-la-Forêt étaient beaucoup plus gais que ceux
des petites villes, d'importance égale, de ma région. Je me suis vite rendu
compte que les plaisanteries, les jeux de mots, les histoires drôles racontées
par les consommateurs n'avaient aucun équivalent chez nous. En fait, ces gens du
Hurepoix, (région comprise entre la Beauce et la Brie) cultivateurs, ou maçons,
ou employés divers tout comme en Corrèze, maniaient le langage parlé avec une
virtuosité et une invention remarquables : ils étaient réellement drôles.
Seulement voilà : le français est leur langue authentique depuis toujours. Ils
possèdent un français parlé avec lequel ils jouent, avec lequel ils savent
plaisanter. Pour retrouver la même atmosphère de bonne humeur générale et de
franche cocasserie, dans un petit café corrézien il faudrait remonter aux
années 20, à une époque où les conversations s'y faisaient uniquement en
occitan. De nos jours, les gens y sont beaucoup moins drôles, ils ne savent pas
jouer avec la langue française et répètent, parfois, des blagues éculées du
genre : « Comment vas-tu-yau de poêle ? » Ce n'est pas par manque de finesse,
c'est tout simplement par manque de langage. Pour dire les choses poliment, ils
sont à cheval sur deux proses... Et, bien sûr, comme on ne peut pas faire de jeux de mots
sans mots, ce manque de langage devient un manque d'esprit. »
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