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mercredi 21 mai 2008

Le rescapé du Guichet à Milly la Forêt

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Il y a quelques temps, les journaux relataient la disparition inquiétante d’un ancien commerçant habitant Milly (Seine-et-Oise), M. Thiercelin qui, parti le matin pour la chasse, n’était pas rentré chez lui la nuit venue.
Dans la localité, on ne parla de rien moins que d’un attentat. Et immédiatement une battue fut organisée dans la campagne et les bois pour retrouver M. Thiercelin, mort ou vif. Gendarmes, sapeurs-pompiers, chasseurs s’en allèrent par une nuit obscure et glaciale, sous la pluie, à la recherche du disciple de saint Hubert.
Pendant de longues heures on parcourut les environs sans relever le moindre indice. Déjà l’on désespérait, lorsque, vers huit heures du matin, la petite troupe qui revenait vers Milly, navrée de n’avoir rien trouvé, fut attirée par un bruit insolite provenant d’un bois.
On y courut et l’on fut tout étonné d’apercevoir, émergeant d’un trou, deux pieds qui s’agitaient désespérément. C’étaient les pieds de M. Thiercelin.
Le chasseur était pris dans un terrier à lapins. Entraîné par l’ardeur de sa chasse, l’ancien commerçant, n’ayant pas de furet à sa disposition, avait voulu forcer lui-même dans sa retraite un lapin qui venait de lui échapper et qu’il avait poursuivi jusque là. Le trou était plus profond qu’il le croyait, et l’infortuné s’y était enfoncé presque entièrement sans parvenir à se dégager.
Ceux qui l’avaient cherché pendant toute la nuit lui rendirent ce service. A leur grande stupéfaction, M. Thiercelin sortit de là en parfaite santé, mais dans quel état !
Et, leur contant sa mésaventure dont il était le premier à rire, il affirma être demeuré dans cette fâcheuse situation pendant vingt-trois heures et avoir désespéré un moment d’en pouvoir jamais sortir.
On juge de la réception que les habitants firent à son retour à Milly à l’ « homme-furet », qu’ils ont ainsi baptisé, et qui désormais, bon gré mal gré, conservera probablement ce surnom.

Transcription du texte publié dans le journal « Le petit Parisien illustré » du 2 décembre 1906




Personne n’a oublié l’étrange aventure de chasse dont fut victime à la fin de l’année dernière un honorable habitant de Milly, M. Thiercelin, qui resta pris dans un terrier sous une roche du bois du Guichet, à Courances, roche qui fut baptisée depuis « la roche Thercelin ». L’affaire ébruitée par la presse parisienne eut un certain retentissement, elle donna même lieu à l’édition d’une carte postale.
Cependant le héros de cette aventure n’avait pas été sans ressentir, tant au niveau physique qu’au moral, les plus fâcheux effets d’un séjour de 23 longues heures dans le véritable sépulcre où il s’était imprudemment engagé ; il eut notamment, il y a un mois, une crise d’hallucination terrible ; il voyait partout la roche fatale et le trou où l’on voulait le précipiter, c’était l’unique objet de ses conversations : « Le trou, le trou… ! » répétait-il.
Les soins affectueux et éclairés des siens le ramenèrent au calme ; puis une nouvelle rechute se produisit, et quoi que puissent lui dire sa femme et son frère qui l’accompagnaient dans ses promenades, il était pris de cette idée fixe qu’il avait un boulet au pied.
Enfin, la semaine dernière, il paraissait tout à fait rétabli, ne parlant plus de roche, de trou, ni de boulet ; sa femme crut pouvoir le laisser sortir seul et dimanche, vers trois heures, M.Thiercelin sortait pour aller chez le coiffeur et ensuite faire sa partie au café de la Renaissance.
Vers sept heures et demie, son mari n’étant pas rentré à la maison, Mme Thiercelin se rendit au café, personne n’y avait vu son mari, pas plus que le coiffeur, pas plus que les personnes amies chez lesquelles il aurait pu se rendre ; on fouilla toute la ville, les bois avoisinants, la roche fatale même fut visitée.
Enfin, vers onze heures du soir, Mme Thiercelin découvrait son malheureux mari dans la fontaine de M. Gastellier, au lieu dit Saint-Blaise ; il avait les jambes dans l’eau et le corps renversé sur les marches de la fontaine.
M. le Docteur Laroche, appelé en toute hâte, se rendit sur les lieux et constata que M. Thiercelin respirait encore, mais il rendait le dernier soupir pendant qu’on le transportait à son domicile.
Que s’était-il passé ? Les hypothèses se donnent libre cours à ce sujet. Ce qui paraît le plus vraisemblable, c’est que toujours poursuivi par cette idée fixe qu’il n’avait plus les pieds comme tout le monde, le « rescapé » du Guichet s’en alla pour les soulager se mettre les pieds à l’eau de la fontaine de M. Gastellier située à proximité de chez lui ; il aurait été frappé d’une congestion provoquée par la fraîcheur de l’eau.
M. Thiercelin a été inhumé mardi dernier, dans une concession de famille, au cimetière de Milly. La cérémonie religieuse avait eu lieu à l’Eglise Notre-Dame. Une grande partie de la population a tenu à l’accompagner à sa dernière demeure, pour témoigner à sa veuve et à sa famille qu’elle partage pleinement leur douleur. Nous aussi nous leur adressons nos sincères condoléances.

Transcription du texte publié dans le journal « L'Abeille d'Etampes » du 20 avril 1907


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